Voilà maintenant plus de 80 heures que je joue à Lies of P, le souls-like signé Round 8 Studio. Je vous livre ici mes impressions sur cet univers de Pinocchio revisité.
Un jeu signé Neowiz et Round 8 Studio
Annoncé en 2021, Lies of P est une création du studio coréen Round 8. A l’époque le jeu avait interpellé par son parti pris : revisiter le conte de Carlo Collodi, Pinocchio, à travers un action-RPG de type “souls”. Si le livre du célèbre auteur italien a déjà été revisité par Disney, à travers une adaptation enfantine et plutôt coloré, Round 8 a choisi, dans cette interprétation, de proposer un côté plus sombre de l’histoire de Pinocchio.
Et on peut dire qu’il ne reste presque plus rien du conte original si ce n’est certains personnages (Geppetto notamment) et l’omniprésence des principes de mensonge ou de vérité.
Tout comme le conte original, la marionnette Pinocchio pourra (tout dépendra de vos choix comme vous le verrez) devenir un être humain à part entière.
Une inspiration voulue et assumée
Le studio ne s’en cache pas, Lies of P a repris les codes qui ont fait le succès des jeux From Software et notamment le jeu Bloodborne. Ne vous étonnez donc pas si certaines zones ou si certaines mécaniques de gameplay vous rappellent beaucoup Bloodborne.
Mais en réalité, il faut plus voir Lies of P comme un genre souls, avec ses qualités, ses parti-pris et ses mécaniques propres, mais aussi ses défauts et non pas comme une pâle copie de Bloodborne/Elden Ring/Sekiro.
Car oui Lies of P ne se contente pas de reproduire à l’identique ce qui a marché pour From Software. Il apporte sa touche bien à lui, en commençant notamment par une explication du lore omniprésent.
Lies of P conte l’histoire de …
Quel fan n’a jamais passé de longues heures à regarder des vidéos YouTube, à lire des articles sur l’histoire de Bloodborne, Elden Ring, etc. ? Chaque streamer, youtuber, blogueur, y allant de sa propre analyse et de sa propre interprétation. Lies of P est tout le contraire des jeux From Software sur ce point là…
Le joueur incarne la marionnette Pinocchio. Alors endormi dans un train, vous êtes réveillé par un mystérieux papillon bleu.
Rapidement, vous vous rendez compte que la ville de Krat est complètement assiégée par les marionnettes. A feu et à sang, vous devez retrouver la trace de Geppetto afin de savoir ce qui se passe réellement.
Pourquoi les marionnettes sont-elles devenues folles ? Pourquoi ne respectent-elles pas les 4 principes du Grand Contrat et particulièrement l’un d’entre eux : “les marionnettes ont été créées pour servir les humains” ? Par qui Pinocchio a-t-il été réveillé ?
Toutes ces questions trouveront réponses dans Lies of P… et sans forcément chercher ou lire une tonne de documents, notes et affiches en tout genre à votre disposition. En effet les développeurs ont jugé bon d’ajouter pléthore de cut-scènes et dialogues avec les PNJ, pour expliquer ce qui se trame dans la ville de Krat.
Les collectibles ramassés dans le jeu ne sont pas pour autant dénués d’intérêt et apportent quelques explications supplémentaires. Toutefois ils ne sont pas nécessaires pour comprendre la trame générale ni les tenants et aboutissants du jeu.
Le sentiment d’avoir compris l’intégralité de l’histoire de cet univers, en terminant le jeu, est très satisfaisant. Je me rappelle des jeux comme Bloodborne ou Elden Ring, où chaque joueur doit se faire sa propre idée du scénario. Alors oui bien sûr on peut lire les différents collectibles trouvés ici et là, mais c’est, dans bien souvent des cas, sujet à interprétation… et voulu aussi par From Software.
Attention, je ne dis pas que Lies of P n’est pas sujet à interprétation mais on arrive dans les grandes lignes à comprendre ce qui se passe. Cela est d’autant plus vraie si vous visualisez les 3 fins possibles.
Une fois la première heure passée et le premier boss vaincu, vous vous retrouverez à l’hôtel Krat, le hub de Lies of P par où vous passerez de nombreuses fois. C’est aussi là que la plupart des PNJ importants de l’histoire se réfugièrent.
Lies of P est avant tout un souls
On ne va pas se mentir, Lies of P, dans son gameplay ressemble pas mal aux jeux From Software : esquive, attaque, attaque chargée, parade, utilisation des consommables, etc.
Dès les premières heures de jeu, on vous explique que la garde et la garde parfaite seront primordiales pour vous défaire de vos ennemis. Alors certes elle est utile, mais il est tout à fait possible de terminer le jeu, en esquivant au bon moment. Hormis pour le menu fretin, j’ai favorisé l’esquive de bout en bout lors de ma partie. Toutefois, en NG+ j’étais plus dans une optique de garde et garde parfaite.
Pour réaliser une garde parfaite, vous devez appuyer sur la touche de garde au bon moment. Si vous tardez trop, vous subirez des dégâts ou sinon vous parerez l’attaque mais votre jauge de vie diminuera également.
Réaliser une garde parfaite fait perdre à l’ennemi sa posture mais abaisse aussi la durabilité de son arme, voire la casse si beaucoup de gardes parfaites sont réalisées.
Lors d’une garde parfaite, l’arme de l’ennemi devient pendant un laps de temps orange et lumineuse. C’est une manière de signaler qu’elle se fragilise.
Une fois son arme cassée, vous subirez bien moins de dégâts. Attention toutefois, pour certains ennemis qui n’ont pas d’arme à proprement parler, la garde parfaite ne servira qu’à briser sa posture… et c’est déjà pas mal.
En effet lorsque la posture de l’ennemi est brisée, sa jauge de vie clignote et possède un contour blanc. Vous devrez alors réaliser rapidement une attaque chargée pour l’étourdir pendant un laps de temps. Vous l’aurez compris, pendant cette durée, l’ennemi sera inoffensif et vous pourrez lui occasionner des dégâts en toute tranquillité. Mais c’est aussi à ce moment précis que vous pourrez réaliser une attaque puissante
Lies of P intègre également une mécanique de stargazers et d’accumulateurs de pulsation. Les premiers vous permettent de sauvegarder votre partie et de voyager également vers un autre stargazer actif (ou vers l’hôtel Krat). Plus tard, d’autres actions seront permises.
Les secondes permettent de recharger votre jauge de santé. Ils sont en nombre limité mais ce nombre augmentera au fur et à mesure de votre aventure. Une fois à zéro, vous pouvez en obtenir un autre en réalisant des exécutions, en parant, ou tout simplement en éliminant les ennemis
A noter qu’utiliser un stargazer réinitialise les ennemis de la zone mais recharge également vos accumulateurs de pulsations.
Ces quelques éléments vous rappellent-ils les jeux From Software ? C’est normal, c’est bien le cas. Et je pourrai continuer encore la comparaison sur d’autres éléments de gameplay (l’amélioration des armes, les statuts de votre personnage, la montée de niveau, les marchands, etc.) mais je trouve justement que Lies of P souffre trop de la comparaison.
A chaque fois qu’un souls-like est disponible sur le marché et qu’il ne provient pas de From Software, on s’acharne à trouver des similitudes, à le comparer en utilisant des superlatifs, “c’est bien”, “c’est moins bien”, au lieu de prendre le jeu pour ce qu’il est : un jeu de genre “souls”. Les comparaisons de type “ah dans Lies of P, il n’y a pas de coopération ou de système d’invocation” me font aussi sourire. Il n’y a pas un élément From Software ? “ça ne va pas”. Le studio propose une mécanique différente ? “ce n’est pas comme From Software”.
Oui, Lies of P n’est pas Sekiro, Bloodborne ou encore Elden Ring, mais qu’importe en fait, ce n’est vraiment pas ce qu’on lui demande. Si vous avez envie d’avoir un jeu comme Bloodborne… vous jouez à Bloodborne :)
Bien entendu qu’il propose des mécaniques similaires… comme dans tous les jeux de genre “souls”. Je trouve toutefois que Lies of P a son univers bien à lui et j’ai personnellement été plus que conquis par cette revisite.
Lies of P…ersonnalisation
Lies of P dispose d’un panel de personnalisation plus que conséquent. Dès le début de votre aventure, vous remarquez que Pinocchio possède un bras mécanique : le bras de légion. Cela donne d’ailleurs des cut-scènes assez classes où P défonce des portails, des grilles ou encore des coffres blindés.
A l’aide de jointure de légion vous pourrez fabriquer d’autres bras de légion à l’hotel Krat. ils sont à peine une dizaine mais proposent tous un gameplay assez varié : poses de mines, lance-flammes, grappin pour ramener/se déplacer vers un ennemi, canon, etc.
Vous pouvez d’ailleurs les améliorer par 3 fois chacun afin de débloquer d’autres compétences supplémentaires : être capable de tirer une seconde fois au canon, pouvoir poser plus de mines, etc.
Mes favoris sont personnellement Yeux de faucon (“le canon”) et Fil de marionnette (“le grappin”). Une fois améliorés à fond, ils proposent tous les deux, des possibilités de se défaire des ennemis de manière efficace et rapide.
Round 8 a eu la bonne intelligence d’utiliser la nature même du personnage (une marionnette) pour proposer une personnalisation de certaines de ses parties : jointures, ossatures, cartouches, convertisseur, etc. Ces éléments sont regroupés sous le nom de pièces de défense. S’ils augmentent votre défense et votre résistance aux différents statuts et éléments (feu, électricité, acide), les meilleures pièces sont aussi plus lourdes et augmenteront l’utilisation de l’endurance lors d’actions (frapper, courir, esquiver, parer).
Ce n’est pas la seule manière de personnaliser sa marionnette. Outre les tenues et masques que vous trouverez ou gagnerez, Round 8 a mis le paquet sur les armes et leur customisation.
Chaque arme normale (ce n’est pas vrai pour les armes spéciales) possède une lame et une poignée. Lors de votre arrivée à l’hôtel Krat, un PNJ du nom d’Eugénie, vous expliquera que vous pourrez assembler les armes de votre choix. Autrement dit, vous pouvez prendre n’importe quelle lame pour l’assembler avec n’importe quelle poignée.
C’est très simple. Chaque lame et chaque poignée possède une capacité, appelée “les arts de la fable”, la magie dans Lies of P. Vous pouvez très bien par exemple combiner une poignée de sabre avec une hallebarde, une dague de feu avec un manche de pioche. Toutes les combinaisons sont possibles, d’autant qu’il y a plus d’une trentaine d’armes normales dans le jeu (à condition de les trouver ou de les acheter).
Assembler vos propres armes, vous permet également de changer la façon d’entreprendre les combats : une arme qui a un effet destructeur (=qui occasionne beaucoup de dégâts) mais qui est lourde et par conséquente lente, ou une arme un peu plus petite, qui fait moins de dégâts mais qui inflige une altération d’état (feu, électricité, acide) à votre ennemi. A vous de choisir le meilleur compromis entre Technique et Mobilité, deux termes que vous serez amenés à comprendre rapidement si vous souhaitez vous en sortir.
L’Organe-P, le cœur de Lies of P
L’autre élément de personnalisation majeur de Lies of P est l’Organe-P. L’organe-P est réparti en phases. Chaque phase regroupe 4 talents (ou compétences, aptitudes) majeurs. Les talents majeurs quant à eux contiennent au moins 2 talents mineurs (2 pour les phases 1 et 2, 3 pour les phases 3 et 4, 4 pour les talents de la phase 5 et 6 (NG+ uniquement), etc.)
Pour activer les compétences mineures, vous aurez besoin de Quartz. C’est une ressource qui se trouve en battant des boss ou dans certains coffres. Les aptitudes majeures quant à elles sont disponibles pour votre personnage quand toutes les capacités mineures sont activées.
Comme talent majeur, citons par exemple l’augmentation d’accumulateurs de pulsations par défaut, l’augmentation de la durée de stupéfaction ou du nombre de slots de fables.
Les talents mineurs sont regroupés par 4 catégories et vous ne pouvez pas en sélectionner deux ou plus de la même catégorie au sein du même talent majeur. Certains apportent un vrai plus : augmentation de l’ergo (la ressource principale utilisée pour augmenter son niveau ou acheter des articles) en tuant des ennemis, durée de stupéfaction augmentée en cas d’attaque surprise, nombre d’objets de jets supplémentaires, etc.
Je trouve dommage toutefois que l’organe-P arrive tardivement dans le jeu. C’est vraiment le genre de chose qu’on aimerait modifier au début contre certains boss. Au même titre que le respec qui n’arrive qu’au chapitre 7 et qui permet de réinitialiser l’Organe-P, les niveaux et donc les attributs associés( capacité, technique, vigueur, mobilité, et cetera), les bras de légion, etc.
Un univers dark-fantasy séduisant
Round 8 a totalement inventé le monde de Lies of P et sa ville fictive de Krat, en se basant notamment sur la Belle Époque (période qui s’étend du 19ème siècle jusqu’au début de la première guerre mondiale et qui marque les progrès sociaux et économiques)
Hormis l’hôtel Krat, havre de paix pour le joueur et passage quasi obligé entre les chapitres, les décors sont assez ternes, glauques et pesants.
Les développeurs ont voulu retranscrire une ambiance oppressante dans chaque zone : cadavres gisant au sol, pendus, portes cassées, maisons en ruines, zones en feu, etc. La météo qui change selon la zone parcourue ajoute une couche pesante à cette atmosphère déjà bien noire. Tantôt brumeuse, pluvieuse, ou sombre, de nombreuses fois, je naviguais doucement pour ne pas me faire surprendre.
Toutefois, si les décors sont pesants, ils n’arrivent pas à nous surprendre, sauf peut-être lorsque nous arrivons devant la cathédrale de Saint Frangelico. Les couleurs à l’intérieur sont d’ailleurs plus vives, plus lumineuses, mais cela ne représente qu’une faible partie de cette zone.
Les dangers sont d’ailleurs omniprésents, qu’ils proviennent d’ennemis cachés dans des coins et près à vous foncer dessus ou à vous pousser d’un rebord, ou que ce soit des pièges : boule en feu qui vous fonce dessus, plancher qui casse quand vous marchez, pièges à ours à peine visible, etc.
A cette atmosphère glaçante s’associent des bruitages d’excellentes factures. Il n’est pas rare d’entendre des bruits bizarres, même lorsque l’on se sent en sécurité, à proximité d’un stargazer.
Saluons également le doublage d’excellente facture. L’intégralité des voix sont en anglais mais cela n’empêche pas aux acteurs de prendre un accent italien par exemple (Venigni) ou d’avoir une voix assez “automatisé” quand il s’agit d’incarner Pulcedina ou Pollendina. Quant au personnage de Sophia, très importante dans le jeu, elle est incarnée par Allegra Marland (doubleuse de Milicent dans Elden Ring). D’une voix calme tout au long de l’aventure, elle permet d’adoucir les phases de tensions.
En revanche, j’ai trouvé que la bande-son était en retrait dans les deux tiers du jeu. Elle s’accélère et montre un peu plus son tempérament vers la fin.
Une vraie belle surprise
Sans redéfinir le genre, et ce n’est pas non plus ce qu’on lui demande, Lies of P propose une vraie interprétation du conte de Carlo Collodi.
L’histoire est prenante, les combats de boss grisants, le scénario (dont la scène post-crédits nous laisse entrevoir une suite probable) intéressant, et la multitude de détails montrent que Round 8 a pensé à tout et a peaufiné chaque facette de l’univers de Pinocchio.
Lies of P est personnellement mon coup de cœur de cette rentrée. J’ai particulièrement aimé le titre, j’en suis à ma NG+ et je suis également en train de préparer en parallèle une tonne d’articles et de vidéos.
J’ai beaucoup aimé cette interprétation de Pinocchio. Raconter le lore à travers les dialogues, ou les cut-scènes, m’ont réellement plu. J’ai terminé le jeu avec un sentiment de pleine satisfaction.
Points positifs :
- Une histoire complètement intégrée dans le jeu
- Le conte de Carlo Collodi à la sauce Dark Fantasy
- Le système de mensonges qui a de réelles conséquences
- La structure du level design
- Des combats de boss intéressants, stratégiquement parlant
- Le doublage d’excellente qualité
- Beaucoup de personnalisation de son personnage
- Une atmosphère pesante et glaçante
- Les détails qui montrent que Round 8 a pensé à tout
Points négatifs :
- L’exploration assez convenue et les pièges assez visibles pour les amateurs du genre “Souls”
- Quelques soucis de caméra
- Le bestiaire du menu fretin peu varié
- Certaines possibilités de gameplay qui n’arrivent que bien trop tard
- Une bande-son un peu en retrait les deux tiers du jeu
- Des décors qui ne surprennent pas